dimanche 30 décembre 2012

CAP infirmier

Ou comment l'Union Europeenne tente de déqualifier la formation en soins infirmiers.


 


Une future infirmiere..tres prochainement 

J'ai recraché mon café par les trous de nez ce matin en apprenant ça sur mon groupe Facebook préféré.
Pour ceux qui auraient la flemmingite dominicale, je vais vous résumer très brièvement la situation : l'union Européenne, à la demande de l'Allemagne, tente de déqualifier nos études en rendant la formation accessible dés la fin de la seconde, et non plus après le bac. Sournoisement, comme ça, entre Noël et le jour de l'an. Permettez moi d'être grossière comme un chameau mal luné face à cette information mais What the fuck ?

L'Allemagne est l'un des seuls pays (peut-être le seul, à rechercher) de l'UE à ne pas avoir d'infirmières à proprement parler, chez eux les IDE correspondent plus aux aides-soignantes chez nous, les médecins se collent aux actes plus techniques. Donc effectivement la formation des infirmiers est moins exigeante là-bas. Mais pourquoi devrait-on niveler par le bas ? Pourquoi l'UE n'exige t-elle pas de l'Allemagne de rehausser son niveau de formation pour s'harmoniser aux autres pays ?

J'ai bien peur encore une fois d'y percevoir une histoire de gros sous, une manière de justifier de nous payer au lance-pierre, de nous museler pour mieux nous asservir, et ce toujours au détriment de la qualité des soins.
Je plaisantais souvent avec mes collègues devant la condescendance de certains patients qui pensaient que seuls ceux qui étaient en difficultés scolaires pouvaient vouloir faire ce métier, réduisant notre diplôme à un CAP (ceci-dit je n'ai rien contre les CAP qui peuvent parfois être les seuls diplômes à ouvrir les portes de certains métiers), s'étonnant qu'on sache la propriété d'un médicament, puisse dépister une hypoglycémie ou même qu'on fasse de la recherche. Malheureusement, force est de constater que ces patients auront bientôt raison. La formation d'infirmier risque de devenir une voie de garage pour ceux qui n'arriveront pas à aller jusqu'au bac, la porte facile à prendre, sans plus de réelles motivations que de se débarrasser de ses études.

Au-delà de ça, je doute que cette formation soit adaptée à un adolescent de 15 ans. Actuellement, 30% des étudiants en IFSi ne vont pas jusqu'au bout de leurs études, souvent une erreur d'orientation. En donnant accès à cette formation à un public encore plus jeune, il faut s'attendre à ce que le nombre d'abandons augmente. En effet, il faut avoir les épaules bien solides et se connaître un minimum soi-même pour supporter la douleur, la mort, la vieillesse, prendre le recul nécessaire sur certaines situations. Il faut aussi avoir une personnalité bien construite pour savoir dire non, savoir dire stop quand la hiérarchie nous force à trop tirer sur la corde. Et que dire des patients au comportement sexuel déviant prenant un malin plaisir à mettre mal à l'aise les infirmières qu'ils imaginent nues sous leur blouse ? Une ado de 15 ans, qui risque d'en être la première victime, saura t-elle le remettre intelligemment à sa place ? Quand j'étais encore à l'IFSI, la plupart des étudiants de ma promotion avait soit un bagage universitaire derrière eux, soit une carrière professionnelle, et ce n'est pas un hasard. Les rares qui sortaient du bac sont peut être ceux qui ont eu le plus de difficultés sur le plan psychologique à suivre cette formation.

Du point de vue du patient, je me demande comment il peut vivre le fait qu'une jeune fille tout juste sortie du berceau puisse lui faire sa toilette. Et que dire de la relation d'aide ? Le relationnel, l'écoute, la réassurance sont les piliers de notre profession. C'est ce qui nous différencie de simples techniciennes de soins (même si beaucoup aimeraient nous réduire à ça). Comment peut-on se sentir compris par quelqu'un qui porte encore sur son visage les stigmates de l'enfance ? Il y a bien sûr des ados plus matures que d'autres, mais l'image qu'ils renverront aux yeux de l'autre restera celle d'un novice de la vie.

Enfin quid de notre reconnaissance à bac+3 si difficilement obtenue (non sans se faire allègrement arnaquer au passage d'ailleurs) ? Si les infirmières n'ont même plus le niveau bac, vont-elles passer de la catégorie A à la catégorie C dans la fonction publique ?

Mais surtout que va faire l'ONI ? Va t-il enfin nous prouver qu'il est vraiment là pour défendre notre profession ?

cliquez ici pour un billet sur les économies et la sécurité des soins
 

3 commentaires:

  1. oui ma chère, oui, tu as raison de t'indigner!!! indignons nous tous!!!!

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  2. Celui qui n'a plus la force de s'indigner n'a plus la force de vivre. L'indignation et l'émerveillement sont les moteurs qui nous font avancer (un peu comme l'amour et l'argent mais c'est tout de suite moins poétique...)

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  3. Le jour de la rentrée en première année, nous étions 52.
    À ce jour, en début de 3ème et dernière année, nous sommes 43... Dont 3 cherchent des raisons de rester. Sur ces 40 qui resteront, combien seront présentés au jury final? Sur ceux qui seront présentés, combien seront diplômés?...
    Et dans quelles conditions? On nous renvoie le "nouveau programme" en pleine face. On nous répète que la région est saturée en IDE et qu'on n'aura pas de poste, en tout cas pas de poste qui ne fasse pas de nous un bouche-trou ballotté de service en établissement avec un emploi du temps qui ne nous appartient plus?...
    HEUREUSEMENT il nous reste l'amour du métier...

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